L'évolution du roman au XIX siècle ( VAl)

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le héros romantiqueLE ROMAN ROMANTIQUE

Les raisons de l'essor: Les intellectuels de la première génération romantique, les âmes exaltées et mélancoliques, doués d'une imagination riche, d'une sensibilité exacerbée, d'un tempérament passionné, aspirant à la plénitude de la vie, à l'absolu, ne sont pas satisfaits de la vie commune, ils ne trouvent pas leur place dans une société matérialiste, ils éprouvent une grande insatisfaction, un besoin d'évasion qui les pousse à rejeter une réalité jugée grise, vulgaire, décevante, insuffisante. D'où le repli sur soi-même, le gout de l'introspection, de l'analyse, l'exigence de l'épanchement du moi, de la manifestation de ses sentiments, qui sont à l'origine du roman romantique.

Les caractères - genres: autobiographie ( récit à la première personne) dans des formes différentes: journal intime (Mémoires d'outre-tombe), forme épistolaire (Oberman), roman pseudo-autobiographique où la personnalité de l'auteur, racontant sa propre vie, se cache derrière un héros fictif (Réné, La confession d'un enfant du siècle), tragique, problématique, être au-dessus de la masse, avec ses reves, ses hantises, son exaltation, son besoin d'absolu, son désir de mort;

- thèmes: douleur de vivre et insatisfaction qui engendre la réalité, les tourments de la passion;

- description vague, lyrique de la nature.

LE ROMAN POPULAIRE

Le roman populaire est lié au quotidien dans les deux sens du terme. D'une part c'est à travers le roman populaire que la réalité des miséraux, décrits dans leur marginalité, commence à être représentée en littérature. D'autre part c'est le quotidien, le journal, qui est le moyen privilégié de sa diffusion. Ce genre a connu un grand succès dont les raisons sont à rechercher d'une part dans la manière de diffusion de ces histoires, publiées par épisodes dans les quotidiens, le roman feuilleton, d'autre part dans les principes mêmes qui règlent sa composition: schéma narratif simple, les personnages ont une psychologie élémentaire, recours aux lieux communs pour émouvoir les lecteurs, le dénouement est heureux, les bons triomphent et les méchants sont punis.

Dans le roman populaire on peut reconnaître deux tendances principales:

le roman des bas-fonds, avec la critique sociale que l'observation de ces milieux entraine; le roman de V. Hugo Les Misérables, représentant le monde rural et paysan, permet à l'auteur de dénoncer l'injustice sociale et la misère et de se mettre du côté des déshérités;

le roman historique, né sous l'influence de Walter Scott et dont l'exemple le plus significatif est représenté par le roman de V. Hugo Notre-Dame de Paris.

LE ROMAN REALISTE

Les auteurs:

Sthendal 1783-1842

Balzac 1799-1850

Flaubert 1821-1880

Trois réalismes différents. 

Leurs idées et leurs esthétiques diffèrent considérablement mêmes si tous les trois se proposent de reproduire la “réalité” de façon vraie.

Points de départ communs, résultats opposés ou dissemblable 

Inauguré par le roman populaire, Stendhal et Balzac, le roman réaliste est caractérisé par l'étude, l'analyse, et la représentation de la société contemporaine s'appuyant sur l'observation, la documentation, la rigueur scientifique et non plus sur l'idéalisation; les auteurs réalistes revendiquent la fidélité totale au réel, qu'il soit beau ou laid; c'est pourquoi il est nécessaire de faire recours à une documantation riche et précise ( enquêtes, recherches historiques, scientifiques et géographiques)

 

Ce sont les peintres qui engagent les premières batailles réalistes: au Salon de 1855 Courbet présente 40 toiles qui rompent avec la tradition parce que les sujets sont tirés de la vie de tous les jours. C'est autour de Courbet que se réunissent des peintres, des écrivains et des critiques dont le but est de créer un art nouveau qui, en opposition à l'idéalisme romantique, doit se proposer de représenter ce qu'on voit et uniquement cela et qui doit devenir un instrument d'enquête et de critique sociale.

Courbet - L'enterrement à Ornans ( 1849/1850). Ce tableau a fait scandale parce qu'il représente, avec le souci du détail, un épisode de la vie humaine que l'on a toujours écarté de l'art pour sa nature crue.

  courbet

images-copie-3STENDHAL – Stendhal a défini le roman «  un miroir qu'on promène le long d'un chemin »; en effet il prétend donner un reflet authentique de la société contemporaine sous la Restauration et représenter l'âpre vérité; il veur s'inspirer de la réalité sociale de son époque d'une façon qui se veut objective; son roman Le Rouge et le Noir se veut une chronique ( le sous-titre: Chronique de 1830), une fiction basée sur l'étude du vrai présentant les faits et les personnages d'après nature; en effet, l'histoire de Julien est déterminée par une situation sociale précise et historiquement datée

Pour répondre à ce souci de vérité il s'est inspiré également des faits divers.

Toutefois la critique définit le réalisme de Stendhal réalisme subjectif pour deux raisons:d'une part l'image qu'on donne du réel est celle qui est perçue par la conscience des personnages, de l'autre part Sthendal est souvent présent pour analyser la conduite de ses personnages, pour transmettre sa vision du monde. En effet il n'est pas le romancier omniscient à la manière de Balzac, mais il n'est pas tout à fait absent comme le prétendra le romancier réaliste: il est caché dans les points de vue de ses personnages, qui deviennent ses porte-paroles, ou bien il s'accorde le droit d'intervenir de temps en temps dans de nombreuses intrusions d' auteurs.

Pour ce qui concerne la caractérisation de ses personnages, Stendhal ne fait pas recours à de longues descriptions ou à de longs dialogues; il se limite à présenter le traits essentielles de ses personnages ( un geste, une attitude particulière) et appuie la caractérisation sur les analyses psychologiques;en outre il montre ses personnages en train d'agir et de parler en faisant recours aux techniques de la focalisation interne et du discours intérieur.

Focalisation interne: les événements sont perçus selon la perspective d'un personnage; le regard à travers lequel ce personnage voit la réalité est en fonction de son moi intérieur, son attitude émotive, son état d'âme.

Discours intérieur: le lecteur pénètre directement dans la psychologie du personnage, ce qu'il éprouve, ses pensées, ses sentiments, ses conflits, ses contradictions.

Stendhal romantique?

Stendhal a certains traits du caractère romantique notamment par son goût de l’introspection et l’analyse des émotions. Le personnage de Stendhal est toujours le porte-parole de son auteur et reflète ses aspirations personnelles par l'importance qu'il accorde au moi ( égotisme), à la chasse au bonheur individuel, à la grandeur, aux passions, à l'énergie ( beylisme )

Le héros stendhalien, être d’exception au caractère héroïque, est encore fortement romantique: il représente le conflit entre les désirs,les aspirations personnelles, le noble idéalisme et une société lancée dans la course au pouvoir et à la richesse et manquant de véritables passions et idéaux.

balzacBALZAC – Le projet à l'origine de l' œuvre La Comédie Humaine  est celui de représenter et analyser la réalité sociale et la nature humaine dans toute sa complexité et variété; c'est pourquoi, dans ce cycle comprenant un grand nombre de romans, il y a la représentation sociale des mœurs, des aspirations, des ambitions, des vices et des vertus, des passions de la société sous la Restauration et la Monarchie de Juillet.

Dans l'avant-propos de l'œuvre Balzac expose l'idée sur la quelle repose l'organisation de cette œuvre immense et qui montre la volonté de l'auteur de rapprocher la littérature des méthodes des sciences; en s'inspirant de la théorie du naturaliste Geoffroy Sain -Hilaire, il établit une comparaison entre la société et la nature où les animaux prennent des formes extérieures différentes d'après le milieu où ils vivent; comme il y a des espèces zoologiques différentes, il y a des espèces sociales déterminées par les différents milieux sociaux où les hommes agissent et vivent; d'où la représentation attentive des différents milieux sociaux ( la province, la campagne, la ville, etc.) et la description détaillée des personnages qui sont profondément ancrés dans leur couches sociale déterminant leurs attitudes, gestes, comportement, ambitions.

La description des décors joue un rôle explicatif des personnages et définit le cadre social où ils agissent; il y a une symbiose entre le personnage et le décor où il vit; exemple – Le Père Goriot: tout au début du roman, Balzac décrit d'abord la ville et le quartier où se trouve la pension Vauquer; ensuite il décrit l'extérieur de la maison et après, comme s'il a une caméra, il guide le lecteur vers l'intérieur et seulement après les personnages entrent en scène, comme s'ils étaient une émanation du décor.

Il fait recours à la même technique pour décrire les personnages: de l'aspect physique, habillement, gestes, ton de la voix jusqu'aux traits du caractère, aux indices de la passion qui dirige les attitudes, les actions; conception de la passion chez Balzac: force vitale mais destructive qui conduit à l'avilissement de la dignité, à la perte personnelle et de son entourage, passion obsédante, maniaque annulant tout autre sentiment; en effet Balzac exprime un jugement négatif de la société: c'est une jungle où dominent l'immoralité, l'hypocrisie, le calcul sordide, l'avidité, l'ambition; l'argent est le moteur de la société mais il est capable de déchainer les tendances les plus dépravées, la dégradation et la corruption morales.

Mais l'imagination joue encore chez Balzac un rôle très important; on parle de réalisme visionnaire à cause de son imagination débordante; Balzac a agrandi, déformé et dramatisé le réel selon sa propre vision du monde; en outre il intervient dans la narration en exprimant des jugements personnels à travers des maximes, des sentences ou bien en s'adressant directement au lecteur; c'est l'écrivain démiurge, omniscient et omniprésent, qui sait tout, qui connait tout et qui dirige l'action.

flaubertFLAUBERT - C'est Flaubert qui commence à débarrasser de plus en plus le roman des distorsions de l'imagination et qui marque donc l'apogée de l'évolution du roman réaliste inauguré par Stendhal et Balzac ( ces trois auteurs ont un point de départ en commun: la tentative de reproduire la réalité sociale – aspirations, mœurs, échecs – de leur temps d'une façon vraie et objective, le romancier se voulant l'historien de son temps).

Pour Flaubert le roman n'est pas soumission à la réalité, mais reconstruction et arrangement de la réalité qui se fait avec le choix, le montage, la réécriture des documents et des données du réel; Flaubert affirme également la nécessité de situer la fiction dans un cadre historique véridique, d'enraciner le roman dans la réalité de l'époque pour en mettre en relief certains aspects; c'est pourquoi son roman Madame Bovary a un sous-titre, Mœurs de province, qui définit l'univers social où les personnages agissent, c'est-à-dire l'univers rural et fermé, la petite bourgeoise médiocre et obtuse de la Normandie sous la Monarchie de juillet.

Flaubert base son œuvre sur l'objectivité de la description et la rigueur scientifique comme fondement et garantie de la vérité romanesque et il cherche à donner l'impression du vrai et à renforcer la vraisemblance romanesque à travers la minutie et la richesse des détails des costumes, des comportements et surtout grâce au travail de documentation ( il a lu les traités de médecine pour faire percevoir les symptômes de l'empoissonnent d'Emma par l'arsenic, il a réalisé des enquêtes en interrogeant les gens du milieu provincial et il a rempli ses carnets de notes d'un nombre énorme de remarques, d'observations dans le but de créer un roman ancré dans la réalité).

Dans le but d'atteindre l'impersonnalité Flaubert utilise, en outre, les techniques narratives de la focalisation interne, du style indirect libre ui entrainent la suppression de l'omniscience et omniprésence du narrateur ( Balzac ) qui tient les fils de l'intrique, le démiurge, le créateur de l'univers romanesque; au contraire, chez Flaubert, le texte romanesque s'élabore selon le point de vue des personnages et la représentation du réel est celle qui résulte de la perception des personnages; de la même façon Flaubert élimine le portrait préalable de ses personnages au profit de la construction et de l'évolution des personnages tout au long du roman, en faisant voir au lecteur les sentiments et les émotions qu'ils éprouvent, les perception du réel qu'ils ont dans l'univers fictif où l'auteur les fait vivre.

La description se fait donc par l'alternance des points de vue, ceux de la conscience des personnages: on connait Emma à travers le point de vue de Charles, de son père; seulement au sixième chapitre elle apparait directement en parlant à la première personne; jusqu'à ce moment-là on ne la connait qu'à travers l'image que les autres ont d'elle.

Flaubert s'identifie avec ses héros et ne voit qu'à travers leur regard, ne parle qu'à travers leurs paroles, il a dit « Madame Bovary, c'est moi » pour démontrer qu'il s'est attaché à figurer la réalité à travers les yeux et les sentiments d'Emma, à travers sa conscience.

Pour Flaubert donc le narrateur est dispensé de toute intervention et analyse extérieures; il reste invisible, il ne commente pas, il ne juge pas ce qui se passe dans la fiction; il se limite à communiquer ce que les personnages font, ce qu'ils disent, ce qu'ils pensent; ses interventions se veulent neutres et tout jugement explicite est effacé, ce qui a valu, d'ailleurs, à l'auteur l'accusation d'immoralité. Lors de la publication du roman Madame Bovary en 1857, Flaubert a subi un procès parce que son œuvre est accusée d'outrage à la morale publique et religieuse et aux bonnes mœurs; le principal chef d'accusation lors du procès a été, à côté du choix du sujet ( l'adultère ), l'absence de la part du narrateur de toute prise de position moralisatrice.

Avec Flaubert ce sont le quotidien dans toute sa banalité la plus décevante, l'insignifiance du monde, le vide, l'ennui, la monotonie, le anti-héros avec sa médiocrité, sa bêtise et son échec qui entrent dans la littérature. Flaubert affirmé qu'il voudrait faire un livre sur rien qui se tiendrait de lui-même par la force interne du style. Son roman est un roman où il ne se passe rien, où l'intrigue, l'action se réduit à peu de chose, mais où le style, la perfection formelle, l'harmonie, l'élégance ont la primauté; de cette façon la beauté du style sauve de la médiocrité et de l'insignifiance de la réalité représentée.

Cette préoccupation de la forme l'oblige à se soumettre à un travail épuisant fait de réprises, de corrections du roman: il recherche patiemment le mot juste, l'expression adéquate, il établit des plans minutieux pour parvenir à l'équilibre entre les différentes parties, il lit à haute voix pour vérifier la musicalité de la phrase, l'harmonie de l'ensemble.

 

zolaLE ROMAN NATURALISTE

LES PRECURSEURS - LES FRERES GONCOURT poursuivent le programme du Réalisme et mettent l’accent sur le travail de documentation et la peinture des bas-fonds, de basses classes sociales, les milieux les plus sordides, dans leurs vices, leurs anormalités, leurs laideurs morales et physiques. Ils s’intéressent aux cas pathologiques, cliniques ( folie, histérie, troubles nerveux), à la déchéance du corps plutôt qu’à l’analyse psychologique qui est subordonnée à la physiologie (l’homme est déterminé par son corps, ses instincts, son tempérament). Leur œuvre Germinie Lacerteux en est un exemple . C'est l'histoire d'une jeune fille, abusée sexuellement dans sa jeunesse, qui monte à Paris à 15 ans et travaille au service de Mme Varandeuil. Pour satisfaire son instinct maternel, elle prodigue sa tendresse au fils d'une épicière, le très jeune Jupillon, mais très vite succombe à la passion dévorante qui sera la cause de sa déchéance: son amant lui demande de l'argent, elle s'endette et vole, elle doit faire face aux mépris des gens et finira par sombrer dans l'alcool et par satisfaire ses perversions sexuelles avec de nombreux partenaires lorsque Jupillon la quitte. Elle meurt atteinte d'une pleurésie mortelle.

Le Naturalisme de ZOLA retient les principes du Réalisme mais il le dépasse et pousse à son extrême la volonté d’objectivité, le souci de vérité et de rigueur scientifique. En effet à partir de 1850 sous l’influence du Positivisme, qui recherche dans la science seule la solution des problèmes sociaux et philosophiques, on assiste dans le genre romanesque à une convergence progressive de la réflexion scientifique et la réflexion esthétique qui trouve dans le Naturalisme de Zola son apogée.

Zola se servira de la science non seulement comme garantie de l’authenticité de la description (Flaubert) mais comme modèle : il ne s’agit plus seulement de peindre la réalité telle qu’elle est, comme l’avait fait les auteurs réalistes, mais le roman devient un champ d’investigation où tous les mécanismes, les phénomènes de la société contemporaine doivent être observés et analysés scientifiquement d’après la méthode des sciences expérimentales visant à la conquête de la vérité (le roman se veut le compte rendu d'une étude scientifique qui dévoile le déterminisme héréditaire et social).

 

 

Publié dans Littérature

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